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Etienne Lafont procureur fiscal de Mende

Etienne Lafont procureur fiscal de Mende

Non , le sieur Etienne Lafont , avocat au parlement de Toulouse , procureur Fiscal de l'évêque de Mende , Subdélégué de l'intendant du Languedoc et Syndic du diocèse du Gévaudan , ne fut pas l'homme exemplaire que nous ont présenté certains auteurs , qui n'ont effectué aucune recherche sérieuse sur sa carrière , tout comme il n'est pas mort le lendemain de la Saint Gervais & Protais , jour de l'extermination de la bête de Jean Chastel , même s'il a été inhumé le lendemain de son décès , survenu en 1779 ( pas en 1767 ), au petit cimetière Saint-Gervais (& Protais) à Mende .

 

Nous allons dès à présent vous conter cette autre vérité , la seule et la vraie confirmée par les documents officiels , dont chacun d'entre vous se trouve en mesure d'aller contrôler la véracité au sein des archives . Disons que ce sera un peu plus difficile que de se contenter de lire les lignes d'un livre mensonger , mais la vérité s'obtient uniquement au prix de ces efforts . Quoique beaucoup de sources se trouvent aujourd'hui facilement accessibles en ligne sur internet , comme les états civils et les actes de décès . Ces auteurs qui vous content tous ces mensonges , n'ont donc aucune excuse , si ce n'est d'être un peu fainéants sur les bords , voire , pour certains , d'être tout bonnement mal intentionnés vis à vis de la vérité qu'ils ont tout intérêt à vous cacher .

 

Etienne Lafont était né le 8 mars 1719 à Marvejols (Lozère) et n'avait été baptisé que le 16 mars suivant . Certains auteurs se sont aventurés à dire que Lafont était âgé d'une soixantaine d'années en 1764 , lorsque débuta l'affaire de la  Bête en Gévaudan (?). Il s'agit là d'une grossière erreur puisque le sieur Lafont s'est justement éteint à l'âge de soixante ans , au sein de la ville Mende , le 24 août 1779 . La logique leur a aussi grandement fait défaut puisque , né en 1704 à Marvejols pour être âgé de 60 ans en 1764 selon eux , Lafont n'aurait commencé sa carrière professionnelle en Gévaudan qu'à l'âge de 45 ans ! Un peu tard pour débuter dans la vie en ce temps-là , tout de même ! Outre son acte de décès en 1779 qui certifie son âge de soixante ans à cette date , nous avons à tout hasard vérifié les registres des actes de baptême de Marvejols pour 1704 , sans y trouver la moindre trace d'un nouveau-né répondant au patronyme de Lafont . La chose étant entendue , nous avons là une fois de plus une erreur des historiens de la Bête qui n'ont pas fait le travail nécessaire . Leurs petits défenseurs suivant leur stérile habitude diront que ce n'est pas important . Ce n'est donc pas important de savoir si l'un des principaux acteurs du corps administratif de l'affaire de la Bête avait que 45 ans plutôt que 60 ans lorsque débuta les attaques du monstre anthropophage ? Croyez vous naïvement messieurs qu'au XVIIIe siècle être âgé de 60 ans offrait les mêmes capacités physiques que de nos jours ?  qu'il n'était pas plus facile de présenter une agilité permanente à 45 ans , comme l'a fait le sieur Lafont durant toute l'affaire , qu'à 60 ? C'est à peu près du même niveau mental que ceux qui ne voyaient pas de différence en 1765 entre le porte-arquebuse François Antoine (70 ans ) et son fils Robert-François-Marc Antoine de Beauterne (17 ans)  . Fort de nous avoir gratifié d'une multitude d'erreurs que nous avons passé des années à gommer , l'histoire de la Bête s'est non seulement entourée de prétendus historiens pas très souvent compétents mais surtout  d'une montagne de crétins de la pire espèce qui jusqu'ici n'ont su qu'insulter ceux qui se fatiguent à rechercher bénévolement et quasi anonymement la vérité dans cette affaire , tandis qu'ils cherchent à couvrir ceux qui se gaussent , se flattent voire s'enrichissent sur le mensonge historique .

Voici une fois de plus de quoi faite taire ces misérables imbéciles par l'acte de baptême du sieur Etienne Lafont , le 16 mars 1719 , à Marvejols . L'original se trouve dans les registres des archives départementales de la Lozère .

Etienne Lafont procureur fiscal de Mende

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Acte de décès du sieur Etienne Lafont à Mende le 24 août 1779 .

Acte de décès du sieur Etienne Lafont à Mende le 24 août 1779 .

Le sieur Étienne Lafont fut tout d'abord avocat au parlement de Toulouse . Le 17 mars 1749 , à l'âge de 30 ans , il obtint le poste de Syndic du Diocèse lors des états du Gévaudan tenus à Mende dans la salle du palais épiscopal , suivant la proposition de M. Gros qui s'était démis de sa charge de syndic pour raison de santé . Étienne Lafont eut dès lors pour suppléant , durant ses absences et ses indispositions , le sieur Jean-Baptiste Bonicel de Lhermet (1725-1809) , comme lui avocat au parlement de Toulouse et greffier en titre du diocèse de Mende depuis l'année 1754 : c'est également lui qui succédera en tant que syndic (nommé à ce poste dès le 4 septembre ) au sieur Étienne Lafont , décédé en exercice le 24 août 1779 . Bonicel de Lhermet y servit de cette date à 1789 , et fut de ce fait le dernier syndic de Mende sous l'Ancien Régime . A sa nomination au poste , de Lhermet totalisait déjà 25 années de fonction en tant que greffier du diocèse  . M. Gros , le prédécesseur de Lafont , avait quant à lui servit le diocèse de Mende (à la suite de M. de Saint-Sauveur) durant vingt-quatre années de dur labeur , où il avait parfois cumulé les charges de syndic et de greffier .

Du rang de simple avocat au parlement de Toulouse , Lafont avait obtenu là une belle promotion qui le plaçait , outre son rang de Syndic du Diocèse , en tant que procureur fiscal au service de l'évêque de Mende,  Monseigneur Gabriel-Florent de Choiseul-Beaupré , cousin du premier ministre du roi , le Duc Etienne-François de Choiseul-Stainville  . En prenant quelques raccourcis  - mais si peu - c'est donc lui qui gérait le Trésor du Gévaudan dès cette époque .

Arrêts du Parlement de Toulouse faisant référence au grand malaise qui existait à l'époque de l'affaire de la Bête vis à vis du commandant en chef des troupes de la province pour le Languedoc , et donc le Gévaudan .

Arrêts du Parlement de Toulouse faisant référence au grand malaise qui existait à l'époque de l'affaire de la Bête vis à vis du commandant en chef des troupes de la province pour le Languedoc , et donc le Gévaudan .

Ordre et sécurité à Toulouse au XVIIIe siècle .

Ordre et sécurité à Toulouse au XVIIIe siècle .

A l'instar de tous les parlements à l'époque (celui de Bretagne allait bientôt annoncer des jours houleux pour le gouvernement royal) , le Parlement de Toulouse savait montrer son esprit d'hostilité et d'indépendance face au pouvoir qu'il jugeait bien trop totalitaire . Cet idéal séparatiste n'avait jamais cessé d'exister depuis que ce territoire avait perdu sa souveraineté sous les coups d'épées de l'armée royale et que sa couronne de Gévaudan et de Septimanie avait dû s'exiler par delà les Pyrénées . Et c'est aussi pour cette raison que des lignées du Gévaudan comme celle des Morangiès ou des Apchier , conservèrent cette passion pour le pays de Cervantès , et même pour s'y réfugier au besoin , comme on peut le découvrir en parcourant leurs correspondances . Le nouveau commandant en chef de l'armée pour la province du Languedoc (et donc du Gévaudan) , le Duc Charles de Fitz-James avait succédé en 1762 au maréchal Charles O'Brien , comte de Thomond , qui avait reçu les grands honneurs du Gévaudan lors de sa venue à Mende en compagnie de l'Intendant de la province , au cours de l'année 1761 . Très vite , après sa réception au rang de commandant en chef de la province , le Duc de Fitz-James avait voulu affirmer son autorité et plus particulièrement à propos de la noblesse de robe et des membres du Parlement de la province , à Toulouse . Dès 1762 , il entra en conflit avec le Parlement et imposa ''manu militari'' sa loi par la botte et l'épée . Il se disait dépositaire des ordres du roi pour en imposer à cette assemblée séditieuse , par la force au besoin. Il fut finalement dépossédé de son rang en 1765 par ce même pouvoir et remplacé par Charles-Juste de Beauvau, prince du Saint-Empire qui, bien que le poste soit vacant depuis janvier 1765, n'y prit son service qu'à la  toute fin de l'année, en décembre, lorsqu'il gagna la province et les Etats Généraux du Languedoc à Montpellier . Ce dernier s'occupa personnellement de Jacques Portefaix qui venait de combattre la Bête en janvier avec ses six petits camarades , non loin du village du Villeret en la paroisse de Chanaleilles . Le prince resta d'ailleurs continuellement en contact avec le jeune Portefaix puisque nous savons qu'ils correspondaient toujours en 1784 . Et cela bien que le prince de Beauvau n'avait plus la charge du Gévaudan puisque Louis XV lui avait retiré son commandement du Languedoc en 1771 , uniquement parce qu'il avait osé rendre visite à son cousin le ministre Choiseul , cassé de son gouvernement et exilé en son château de Chanteloup sur ordre royal . Il est vrai que le prince de Beauvau , qui était aussi l'ami du prince de Conti , s'était déjà opposé à Louis XV en 1767 , lorsqu'il avait fait libérer contre ses ordres les anciennes prisonnières protestantes de la Tour de Constance à Aigues-Mortes (dont la célèbre Marie Durand). Cela lui avait valu un premier blâme . Il n'y avait là rien d'étonnant pour un membre de la Cour du Grand Maître du Temple que de témoigner de sa sympathie envers ces prisonnières protestantes au point de les faire libérer de leurs immondes geôles .

Ceci nous ramène au Duc de Fitz-James qui fut donc également cassé et remplacé sur ordre de Louis XV en cette fin d'année 1765 . Son frère , François de Fitz-James , l'ancien aumônier du roi , connaissait déjà le même sort et l'exil en son diocèse de Soissons depuis l'année 1750 suite à ses actes de 1744 où il avait fait fléchir le roi lors de son étrange maladie à Metz . Nous avons vu sur une autre page que le Cardinal de Bernis et son cousin Pierre-Charles de Molette de Morangiès , qui connurent un sort similaire de la part du roi , s'étaient retrouvés sur ce secteur de Soissons en 1759 en compagnie de l'évêque François de Fitz-James et de quelques autres ecclésiastiques de haut rang et qu'ils y complotèrent contre le roi sous les yeux impuissants du ministre Saint-Florentin, qui était chargé de les surveiller.  Bien curieusement , Edouard de Fiz-James avait déjà voulu venger son frère l'évêque en provoquant en duel un des principaux fidèles officiers de Louis XV , le Maréchal de Coigny . Cette même famille qui eut encore maille à partir , puisque le sang fut versé , avec le gouverneur du Languedoc , Louis-Auguste II de Bourbon , prince des Dombes, qui tua en duel le marquis de Coigny en 1748 . Lui même devait décéder des suites d'un duel, orchestré par le fils vengeur de Coigny, en forêt de Fontainebleau le 1er octobre 1755, et le commandement du Languedoc et du Gévaudan passa de ce fait entre les mains de son frère Louis-Charles de Bourbon qui supervisa toute l'affaire de la Bête du Gévaudan . Cette réalité historique est malheureusement écartée des livres par des auteurs qui confondent souvent ce prince du sang, le petit fils de Louis le quatorzième du nom, le plus puissant des rois de France de l'ensemble de notre Histoire,  avec le simple lieutenant-général de Moncan . Cela en dit malheureusement très long sur le niveau de compétences historiques de ces prétendu experts de l'affaire de la Bête qui publient régulièrement des livres sur ce thème !? 

Ce fut donc le  Duc de Fitz-James  , cet héritier des dragons rouges et des aigles bicéphales des rois d'Ecosse , d'Irlande et d'Angleterre , des Stuart et des Ducs de Marlborough , cet ancêtre de Winston Churchill , qui en réalité dirigeait militairement le Gévaudan comme l'ensemble du Languedoc lorsque la Bête porta ses méfaits en ces terres occitanes .

Le 13 septembre 1764, en pleine affaire de la Bête, le cardinal Antoine de Clériade de Choiseul-Beaupré fut reçut à Mende en très grandes pompes ; rien n'était trop beau pour honorer la venue du cousin de l'évêque et du ministre du roi. Une compagnie bourgeoise de cent hommes forma une haie depuis la porte d'Aigues-passe jusqu'au palais épiscopal de la cité. Il fut dressé, au centre de la ville, un arc ce triomphe et une plateforme en balustrade avec un obélisque pyramidal à quatre faces sur lesquelles étaient fixées des lampions, des peintures et des inscriptions de louanges en l'honneur octroyé à la cité par une aussi prestigieuse visite. Les armes de son Éminence furent suspendues au cœur de l'arc de triomphe. Le tout était enjolivé par un vol de fusées et de serpenteaux. Il semble que la ville Mende était assez coutumière de ce type de cérémonie puisqu'elle en avait fait tout autant lors de la venue du Maréchal de Thomond et de l'Intendant de la province en 1761 . Charles O'Brien, Maréchal de France, comte de Thomond, fut le commandant en chef des troupes royales pour le Languedoc, de 1757 à 1761, et se trouvait sous les ordres du Gouverneur de la Province, le comte d'Eu. Son successeur ne fut autre que le Duc de Fitz-James (de 1762 à 1765), lui-même remplacé par Charles de Beauvau, Prince du Saint-Empire, qui occupa officiellement la fonction de commandant en chef de 1765 à 1771. l'Intendant de la province était le sieur Jean-Emmanuel de Guignard, vicomte de Saint-Priest (de 1751 à 1764), remplacé par son fils, Marie-Joseph-Emmanuel de Guignard de Saint-Priest, qui demeura à ce poste jusqu'en 1786. Successeur : Charles de Ballainvilliers, jusqu'à la Révolution , en 1789 .

Le 13 septembre 1764, en pleine affaire de la Bête, le cardinal Antoine de Clériade de Choiseul-Beaupré fut reçut à Mende en très grandes pompes ; rien n'était trop beau pour honorer la venue du cousin de l'évêque et du ministre du roi. Une compagnie bourgeoise de cent hommes forma une haie depuis la porte d'Aigues-passe jusqu'au palais épiscopal de la cité. Il fut dressé, au centre de la ville, un arc ce triomphe et une plateforme en balustrade avec un obélisque pyramidal à quatre faces sur lesquelles étaient fixées des lampions, des peintures et des inscriptions de louanges en l'honneur octroyé à la cité par une aussi prestigieuse visite. Les armes de son Éminence furent suspendues au cœur de l'arc de triomphe. Le tout était enjolivé par un vol de fusées et de serpenteaux. Il semble que la ville Mende était assez coutumière de ce type de cérémonie puisqu'elle en avait fait tout autant lors de la venue du Maréchal de Thomond et de l'Intendant de la province en 1761 . Charles O'Brien, Maréchal de France, comte de Thomond, fut le commandant en chef des troupes royales pour le Languedoc, de 1757 à 1761, et se trouvait sous les ordres du Gouverneur de la Province, le comte d'Eu. Son successeur ne fut autre que le Duc de Fitz-James (de 1762 à 1765), lui-même remplacé par Charles de Beauvau, Prince du Saint-Empire, qui occupa officiellement la fonction de commandant en chef de 1765 à 1771. l'Intendant de la province était le sieur Jean-Emmanuel de Guignard, vicomte de Saint-Priest (de 1751 à 1764), remplacé par son fils, Marie-Joseph-Emmanuel de Guignard de Saint-Priest, qui demeura à ce poste jusqu'en 1786. Successeur : Charles de Ballainvilliers, jusqu'à la Révolution , en 1789 .

Archer de la cité de Toulouse

Archer de la cité de Toulouse

C'est de ce turbulent Parlement de Toulouse, pas du tout favorable au roi mais disposant d'un réel pouvoir d'influence , dont était issu le sieur Etienne Lafont  à cette époque .

Selon le Docteur Michel Bourrier *, les Lafont provenaient d'une lignée de familles protestantes , de huguenots .  Nous avons en effet relevé lors des redoutables persécutions des jugements des tribunaux royaux d'exception qui sévirent durant les Grand Jours du Languedoc de 1666 à 1667 , plusieurs sieurs Lafont , passibles de sévères condamnations . Il semble que cette famille était originaire de la région protestante de Nîmes , région qui fut concernée par les jugements de cette seconde vague des tribunaux royaux qui avait déjà sévis antérieurement à Clermont pour la province d'Auvergne .  On remarque tout particulièrement un sieur Lafont , notaire de son état , condamné à 100 livres d'amende pour avoir modifié des actes en faveur de la religion prétendue réformée (tient donc , en faveur des protestants !) et un autre Lafont envoyé aux galères à perpétuité , ses biens confisqués et 2000 livres d'amende portées à son encontre . On est informé qu'un ancêtre d'Etienne Lafont était justement notaire . Pas étonnant qu'il ait lui même ensuite épousé une carrière dans la robe noire .  Que de bonnes nouvelles pour être en parfaite osmose avec ce pouvoir royal pour les familles Lafont , et surtout pour tourner en ridicule les historiens de la Bête qui osent prétendre que les gabalais étaient tout à fait fidèles au roi .  L'étude du Docteur Bourrier nous laisse clairement comprendre que les sieurs Lafont avaient toujours souhaité un changement de régime et que le fils de Trophime (le neveu d'Etienne  Lafont) s'était bien démené durant la Révolution pour faire appliquer les dures lois de répression à la virgule près . On retrouvait alors tout ce que le régime royal comptait comme ennemis en Gévaudan , qui prenaient la tête de la répression sans le moindre ménagement . Les noms des anciennes familles ressortaient des tiroirs pour rependre du pouvoir , allant même jusqu'aux disgraciés de l'affaire des Indes sous Louis XV . Rien n'était pardonné à la royauté . Après , comme dans tout le Languedoc , il y eut des fanatiques dans les deux camps de cette sanglante guerre civile , tels ceux du camp ecclésiastique qui cherchaient à rejouer dans les bois la guerre des camisards à l'envers nous dit l'historien Michel Bourrier . Cette fois il n'était plus question de mettre sur le compte des loups les multitudes de cadavres de femmes violées et d'enfants mutilés qui jalonnaient le bords des routes en Gévaudan .

* Docteur Michel Bourrier , Trophime Lafont soldat de la Révolution , Editions SERRE , 1er janvier 1989 .

Cathédrale de Mende . Gravure de 1836 éditée par Jules Didot l'Ainé .

Cathédrale de Mende . Gravure de 1836 éditée par Jules Didot l'Ainé .

Au cours du mandat du sieur Étienne Lafont , son frère Trophime fut nommé comme fermier gestionnaire des biens agricoles de Mgr de Choiseul à Serverette (on trouvait aussi un certain Louis Chastel fermier de l'évêché) . Il fut très grassement rémunéré puisque pendant ses neufs années de fonction , il perçut pas moins de 12000 livres annuelles . En juillet 1767 , consécutivement à la soudaine disparition de son protecteur , Monseigneur de Choiseul , il dut répondre de ces avantages excessifs devant la nouvelle juridiction de l'Hôpital de Mende, mise en place par l'épiscopat du futur évêque Jean-Arnaud de Castellane , et rembourser la somme de 2557 livres à la communauté . Il ne fut pas le seul convoqué et condamné , loin s'en faut !

Etienne Lafont procureur fiscal de Mende

Étienne Lafont ne fit pas non plus de grands efforts dans l'économie à son poste puisque , à sa mort , survenue le 24 août 1779 , il avait totalement vidé les caisses du diocèse du Gévaudan . Sa fille fut contrainte trouver un accord avec les nouveaux gestionnaires pour renflouer la trésorerie car les biens laissés par son père étaient loin de couvrir le déficit qu'il avait occasionné dans les finances du Gévaudan .
De ce fait , on ne peut pas dire qu'il fut un bon gestionnaire comme le laissent entendre certains auteurs ; ceci n'est qu'un pur mensonge de plus . Mais on distingue bien en consultant les archives ecclésiastiques de Mende , qu'en 1764 ( année qui connut le début de l'affaire de la Bête ) , il avait sorti des caisses pas moins de 7000 livres à des fins inconnues . Des fonds secrets dont on l'avait peut-être gentiment prié de s'acquitter même s'il était sans doute un peu réticent au départ . On ne connaîtra sans doute jamais la destination de ces fonds mystérieux qui sortirent de la caisse du diocèse à peu près au moment où la Bête apparut sur ses terres .
Quoi qu'il en soit , il laissait tout de même pas moins de 166,735 livres de dettes au diocèse à la fin de son mandat (1749-1779) . Même s'il fut bien engagé pour maintenir coûte que coûte un état raisonnable aux drailles , ponts et routes du Gévaudan , on ne peut absolument pas dire qu'il fut un bon gestionnaire du trésor du pays des gabales .

Voici ce que nous avait précisé à son sujet , M. J. Mouret , il y a déjà quelques années : << aux Archives nationales ,  dans la série H , carton 1040 se trouve un gros dossier qui montre que le sieur Etienne Lafont , pour faire avancer certains gros travaux sur les routes et chemins du Gévaudan , s’était abstenu de respecter les règles administratives , notamment pour souscrire des emprunts ; ceux-ci auraient dû être autorisés par les Commissaires du Pays du Gévaudan , ensuite être soumis aux Commissaires de la Province du Languedoc puis  être ratifiés par le Roi , ce qui était une procédure longue et aléatoire . Il empruntait donc directement à des particuliers de Mende et du Gévaudan , qui lui faisaient confiance et c'est à son décès que ces prêteurs se sont manifestés.
Il utilisait aussi certains budgets pour payer les travaux des routes dans le diocèse . Sa fille et son gendre n'ont apparemment rien eu à rembourser car il a été reconnu , en Conseil du Roi , que les fonds manquants ne l'avaient pas enrichis (il aurait eu un train de vie frugal et serait mort insolvable , ce dont s'était plaint sa fille) .
La découverte de ces "malversations" entraînera une réforme de la procédure des contrôles des diocèses civils par les Etats de la Province . Bien sûr , tout n'est pas dans ce carton , et comme vous le savez une grande partie des Archives de la Lozère ont brûlées , ce qui nous prive de beaucoup de renseignements >>. 

Effectivement , le palais épiscopal à Mende s'était mis à se réchauffer très tôt après la mort de l'évêque de Choiseul (19 jours à dater jour pour jour de celui - inclus - de la mort officielle de la Bête de Chastel , le 19 juin 1767 ) puisque le toit de l'évêché s'était soudainement enflammé le 18 octobre 1767 ( la veille de la mort de Mgr de Ballainvilliers) , juste avant la mise en place du nouvel épiscopat de Mgr de Castellane , qui allait comme on dit sérieusement secouer le pot des privilèges de tous les côtés .

Nous constatons donc que le sieur Lafont menait une véritable vie d'ascète digne de celle d'un parfait , d'un cathare , mais que d'un autre côté , il fut une sorte de Bernard Lawrence Madoff d'avant-garde pour le plus grand malheur du Gévaudan !

Nous adressons nos plus sincères remerciements à M. J. Mouret pour ces capitales et passionnantes informations .

Incendie dans le toit du palais épiscopal après la mort de l'évêque Mgr de Choiseul . Archives départementales , Mende .

Incendie dans le toit du palais épiscopal après la mort de l'évêque Mgr de Choiseul . Archives départementales , Mende .

Principales sources :
- Archives Ecclésiastiques de la Lozère – AD de Mende .
- Procès verbaux et délibérations des États du Gévaudan , Tome VII ,  années 1748, 1749, 1778, (manque 1779), 1780 et 1789 .

Couverture du manuscrit du mandement de Monseigneur de Choiseul , en décembre 1764 , qui mettait en avant l'indentification d'un véritable ''Fléau envoyé par Dieu'' à travers l'incarnation de la Bête Gabalaise .

Couverture du manuscrit du mandement de Monseigneur de Choiseul , en décembre 1764 , qui mettait en avant l'indentification d'un véritable ''Fléau envoyé par Dieu'' à travers l'incarnation de la Bête Gabalaise .

La mort de celui que l'on peut considérer en quelque sorte comme le patron d'Etienne Lafont , l'évêque de Mende , Monseigneur Gabriel-Florent de Choiseul-Beaupré , survient donc 19 journées jour pour jour à la date de la mort officielle de la Bête du Gévaudan tuée le 19 juin 1767 par le sieur Jean Chastel :  c'est à dire le jour même de la fête des Saints Gervais et Protais grandement honorés en Gévaudan , à Mende et aux sein de sa cathédrale comme nous l'avons vu . Ces deux saints faisaient partie du reliquaire sacré de l'Ordre du Temple depuis ses origines à Paris comme nous l'avons aussi évoqué sur une autre page , mais étaient pareillement en rapport avec l'univers cynégétique (la chasse) comme nous le démontre une sculpture de vitrail de l'église Saint-Gervais & Protais ,  en ce haut lieu templier de Gisors qui appartenait depuis 1762 à Louis-Charles de Bourbon , comte d'Eu , autrement dit au gouverneur du Gévaudan et du Languedoc au temps de la Bête , et qui connut également la mort atroce du Duc de La Rochefoucauld , cousin de ceux de Langeac et des Apchier , durant la Révolution . Ce fut dans son hôtel particulier à Paris que fut conduite et enterrée la bête tuée par Jean Chastel le 19 juin 1767 . Le chiffre 9 était omniprésent  dans l'histoire du Temple et le '1' est en numérologie le chiffre de Dieu , comme chacun sait . Mais si Monseigneur de Choiseul trépassa dans le 19e jour de la mort de la Bête du Gévaudan , d'une manière qui nous rappelle un peu celle de Jacques Portefaix , puisqu'il eut tout le temps de refaire son testament à souhait , il n'est pas le seul grand protagoniste de cette histoire de la Bête à être décédé très rapidement après le monstre , puisque l'Intendant d'Auvergne , Monseigneur Simon-Charles-Sébastien Bernard de Ballainvilliers , qui avait géré toute l'affaire de la Bête pour sa province d'Auvergne , devait passer l'arme à gauche le 19 octobre suivant . Nous sommes obligés de constater que cette date n'était pas de bonne augure sur le pays pour tout ceux de haut rang que l'affaire de la Bête du Gévaudan avait impliqués et concernés . Mais l'évêque de Mende nous réserva encore une autre surprise puisqu'il choisit de quitter ce monde le matin du mardi 7 juillet 1767 , jour de la Saint-Thomas , Evêque et Martyr (?) , comme nous le laisse découvrir le calendrier royal de cette année là ?  Et oui ! qui l'eût cru ? ... à part sans doute Saint-Thomas dont la devise était de croire sans toucher !

Etienne Lafont procureur fiscal de Mende
L'évêque de Mende attend sa mort le jour de la fête de Saint-Thomas , évêque et martyr ...

L'évêque de Mende attend sa mort le jour de la fête de Saint-Thomas , évêque et martyr ...

Monseigneur de Choiseul-Beaupré ne quittait-il pas ce monde le coeur léger ? Avait -il des choses à se reprocher dans la gestion de l'affaire de la Bête ou autres ? Avait-il quelques remords pour la publication de son mandement ? On sait tout au moins qu'il y avait entre lui et les Lafont des affaires de trésorerie pas très catholiques comme nous le démontrent l'Histoire et les archives de Mende .

Etienne Lafont procureur fiscal de Mende

Etienne Lafont , héritier de Monseigneur de Choiseul .

Nous avons vu un peu plus haut sur cette page les déboires que connurent les frères Lafont et le fermier Chastel à la mort de Monseigneur de Choiseul en 1767 , et nous n'y reviendrons donc pas . Nous ajouterons juste que devant le tribunal de l'Hôpital de Mende , préparant la venue de Monseigneur de Castellane , Lafont aurait dû effectivement perdre sa place en raison des malversations avérées de son frère Trophime et du fermier Louis Chastel qu'il avait couvert , soit volontairement , soit par incompétence . Ce qui dans les deux cas aurait dû lui valoir la mise à pied de son rang de procureur fiscal et de Syndic du diocèse . Oui mais voilà , à Mende , le sieur Etienne Lafont n'était pas n'importe qui et au sein de l'univers de l'évêque non plus . Pour preuve , cet acte testamentaire de Mgr de Choiseul qui lui transmet ses quatre flambeaux d'argent numérotés . Cela peut paraître anodin aux non-initiés , mais sautera violemment aux yeux de ceux qui le sont , car dans toutes les loges et autres sociétés n'ayant pas forcement pignon sur rue  , les quatre chandeliers peuvent être vus comme le relais de la transmission des pouvoirs , mais aussi comme les quatre colonnes qui soutiennent le Temple dans la loge , en rapport aux quatre colonnes du Temple d'Hiram . Nous ne perdrons pas notre temps à chercher à convaincre les incultes du monde de la Bête qui sont si nombreux agglomérés autour de cette affaire , car quelque part ils ne méritent pas de soulever le manteau de Lumière , tandis que les autres saurons ce à quoi nous faisons référence . i .

Etienne Lafont procureur fiscal de Mende
Le jeune Marquis de Choiseul-Beaupré en habit de drap d'Elbeuf (Elboeuf) offert par son oncle, l'évêque de Mende .

Le jeune Marquis de Choiseul-Beaupré en habit de drap d'Elbeuf (Elboeuf) offert par son oncle, l'évêque de Mende .

Les archives du clergé relatives à l'évêché de Mende nous apprennent que Monseigneur de Choiseul-Beaupré, évêque de Mende, était plutôt généreux avec les membres de sa famille qu'il entretenait quelque peu . Nous constatons par exemple qu'il allouait la somme de 222 livres de pension à Mlle de Choiseul-Beaupré (très probablement sa nièce), de 100 livres à ses cousins à Bar-le-Duc, de 300 livres à l'abbé de Beaupré, et de 1500 au Marquis de Choiseul, son neveu. Nous relevons également 1335 livres engagées lors d'un voyage qu'il avait fait à Paris avec Mme de Beaupré ( très certainement sa belle-soeur ). Il se rendait effectivement assez fréquemment à la Capitale pour porter le cahier des charges de la Province de Gévaudan (sic). Nous voyons , que se trouvant alors à Saint-Papoul, il veillait déjà à l'habillement du jeune Marquis de Choiseul en lui offrant régulièrement un habit : tout d'abord un justaucorps constitué à partir de sept pans d'écarlate puis un habit marron en drap d'Elbeuf garni d'un large galon d'argent de bordé et de boutons de même, avec la doublure de voile de religieuse . Nous découvrons toutefois une lueur de pingrerie - pour ne pas dire une certaine limite à la générosité de l'évêque - puisque nous notons qu'il insiste pour que cet habit soit confectionné rapidement avant la conséquente et prochaine augmentation des étoffes, et que les manches de celui-ci devaient être étroites jusqu'aux parements afin d'employer le moins possible d'étoffe, et enfin, de placer des boutons d'argent seulement d'un côté de l'habit (droit). Point de démonstratif mais seulement du fonctionnel ! ... Mais Monseigneur de Choiseul-Beaupré savait également faire la charité au plus démunis de différentes façons, comme par exemple en offrant assez régulièrement des habits aux mendiants et autres miséreux de la ville de Mende. Nous avons même connaissance d'une requête de la pauvre fille Gabrielle Marcellin (sic) , se trouvant en l'état de mendicité et originaire de la ville de Saugues, adressée aux bons secours de Mgr l'évêque de Mende dès 1727.
Outre les différentes rentes versées par le Clergé de France, les biens de la ville, de l'évêché et de l'Hôpital de Mende, Monseigneur de Choiseul possédait également diverses terres et fermes à Sainte-Colombe, Sermaize et Tironneau . Le gestionnaire des comptes, recettes et dépenses de l'abbaye de Sainte-Colombe pour l'évêque de Mende, n'était autre qu'un certain Monsieur Louis Chastel . Etienne Lafont, le Subdélégué de l'Intendant de la province, était également procureur fiscal de Monseigneur de Choiseul-Beaupré. Il fut en quelque sorte le champion Gabalais de la dépense car durant sa gestion les recettes restèrent toujours inférieures aux dépenses. A sa mort en 1779 , il avait complètement vidé la caisse du diocèse . Son frère , Trophime Lafont , de Maruéjols , était fermier à Serverette . Il perçu pas moins de 108.000 livres de l'évêché durant ses neuf années de bail : soit en moyenne 12000 livres par an . Au décès de Monseigneur de Choiseul , en juillet 1767, ses héritiers , les nouveaux directeurs de l'Hôpital de Mende , eurent quelques soucis pour parvenir à retrouver une trésorerie équilibrée . Le sieur Trophime se trouva ''reliquataire'' de la somme de 2557 livres et 12 sous à rembourser à la communauté . Pour Etienne Lafont , décédé en 1779 , c'est sa fille devenue héritière de ses dettes qui dû concevoir un arrangement avec le nouveau Syndic de Mende afin de combler le déficit comme nous l'avons vu . Il semble que certains fournisseurs de Monseigneur de Choiseul avaient été grassement payés et que les frais occasionnés par certains travaux , plus que largement surévalués . Seule la comptabilité bien ordonnée de l'évêque pouvait permettre de distinguer ces irrégularités ... mais beaucoup d'archives ont brûlées .
 

          Etienne  Lafont  et  la  Bête  du  Gévaudan           

Si à cette heure personne ne semble être en mesure de dire que le sieur Etienne Lafont n'avait pas été à la hauteur de sa fonction dans le traitement de l'affaire de la Bête , car il semble bien qu'il ne ménagea pas sa peine pour régler , accorder et parfaire tout ce qui était nécessaire à l'avancée de sa traque , il est cependant certaines zones d'ombre comme cette histoire de la louve de la Panouse qui peut éveiller en nous quelques doutes sur la clarté et les fondements de son comportement .

Dans une missive datée du 24 avril 1765 , il annonçait qu'une louve pensant environ une quarantaine de livres avait été lancée au lever du jour sur la paroisse d'Arzenc de Randon et qu'elle fut aussitôt poursuivie par des paysans et des chiens mâtins avec lesquels elle s'accrocha à plusieurs reprises et parvint même a  culbuter deux d'entre eux . Elle essuya plusieurs coups de fusils , sans doute trop éloignés pour parvenir à la stopper et probablement chargés de petites postes à loups , plutôt inefficaces . Forcée par cet hétéroclite laisser courre , elle parvint finalement au lieu dit de la Panouse où elle succomba sous les coups de baïonnettes qui la percèrent de toute part . Dès cet instant il était déjà évident qu'il ne pouvait s'agir de la Bête puisque dans son cas , souvenez-vous que les lames de baïonnettes ne pénétraient pas sa peau . Avec ces multiples coups de lame perforantes donnés au hasards sur le corps de cette louve , il aurait été de toute façon totalement impossible d'identifier la moindre trace de défense lors d'attaques sur les petits bergers dans le cas où il s'agissait véritablement de la Bête ... ce qu'elle n'était absolument pas de toute façon !  Ce fut un certain Valentin , qui était fermier chez M. de Randon , qui lui asséna le coups de grâce au moyen de sa lance .

Vers 19 heures ce jour là , Etienne Lafont était informé de cette prise et demandait aux paysans d'apporter cette bête à Mende . Les hommes s'exécutèrent et se mirent en chemin avec leur trophée . Avaient-ils pris tout leur temps en s'arrêtant à chaque cabaret de village sur leur chemin pour montrer la bête et raconter leur exploit tout en se faisant offrir à boire ? Rien ne le dit , mais le sieur Lafont s'impatientant se mit en route pour aller à leur rencontre . Il finit par les retrouver aux abords d'un village et fit décharger l'animal afin de l'observer : ce n'était qu'une louve malodorante , rien de plus . Etrangement , bien que ce ne soit pas la Bête et que la dépouille ne lui appartenait absolument pas , il décida de faire appeler le chirurgien M. Blanc qui l'ouvrit aussitôt et qui n' y trouva que quelques os rongés et des morceaux d'étoffes de tablier de paysanne . S'agissait-il d'une louve anthropophage ? Etienne Lafont prit tout de même la décision de la faire porter à Mende . On apprendra par la suite que ce furent les paysans qui avaient fourré des morceaux d'étoffes dans l'estomac de cette petite louve de la Panouse , croyant bien naïvement duper les autorités et empocher la prime promise pour la capture de la véritable Bête du Gévaudan .

Mais plus que tout , c'est le comportement du Syndic Lafont qui n'est vraiment pas clair dans cette affaire . 

Voyons donc un peu ci-dessous quels étaient les éléments troublants et illogiques autour des actes de Monsieur Lafont .

Si nous sommes informés - suite à l'étude des archives de Mende - que le subdélégué Étienne Lafont n'était absolument pas le fonctionnaire exemplaire que tentent encore désespérément de nous dépeindre quelques stupides auteurs , nous sommes pareillement obligés de remarquer que sa conception de l'identité de la Bête semble avoir été des plus ambiguë , des plus contradictoires .
En effet , tous les passionnés de l'affaire connaissent cette lettre envoyée par Lafont à l'intention de l'intendant du Languedoc , Monsieur de Saint-Priest , par laquelle il affirmait sans détours à l'autorité supérieure de la province que la Bête du Gévaudan n'était qu'un loup ... seulement un gros loup !
Et pourtant , comme nous l'avons vu plus haut , lorsqu'il fut tardivement informé qu'un paysan du village de la Panouse prétendit avoir tué la Bête , il lui demanda d'apporter son corps à Mende afin de l'examiner , mais , n'ayant pas la patience d'attendre , il s'empressa d'aller à sa rencontre sur la route et le rejoignit finalement lui et ses camarades dans un village pour déclarer , après avoir vue cette dépouille , que cette bête n'était pas la Bête tant recherchée mais seulement une simple louve .
N'avait-il pas prétendu que la Bête n'était qu'un loup , une louve ? Comment pouvait-il savoir ce qu'était vraiment la Bête , lui qui ne l'avait jamais vue de visu ? Lui , le bourgeois d'un rang supérieur au menu peuple , était-il incapable d'admettre qu'un simple paysan ait réussi là où de nombreux chasseurs avaient échoués (y compris ceux qu'il avait personnellement envoyés de Mende) ? Ou plus simplement , savait-il véritablement que cette louve ne pouvait être la Bête en question car il connaissait trop bien la juste nature de l'animal concerné ? Il aurait au moins pu , comme on dit dans ces cas là , donner le change , laisser espérer le peuple quelques jours comme cela est arrivé dans d'autres cas similaires durant ces trois années de terreur . Mais non … c'était trop lui demander , et d'une certaine manière son curieux comportement le trahit quelque peu . Il paraît évident que le sieur Lafont tirait derrière lui bien des casseroles dans cette affaire de la Bête et par rapport à ce qu'il était véritablement au niveau du Gévaudan et qui l'obligea à sortir ces fonds secrets en 1764 , à des fins dont nous ne connaissons toujours pas la raison à ce jour …

 

Etienne Lafont procureur fiscal de Mende

Personnel de la cité de Mende au temps de la Bête .

De gauche à droite :

- Consuls de Mende vers 1764 . On retrouvait dans cette livrée les émaux sang et or des comtes de Toulouse et du Languedoc, qui étaient également ceux du chapitre de Mende. Antérieurement, les consuls recevaient un chaperon dit de couleur rouge rayée, probablement encore utilisé au XVIIIe siècle lors de grands évènements : les lignes d'or étaient alors bien plus larges que celles que l'on voit sur le justaucorps de l'illustration. Comme toujours, en raison du règlement, sans le port de la livrée, le consul ne pouvait exercer son métier ! Nous précisons cela principalement par rapport à certains passionnés de l'affaire de la Bête qui ont la dommageable naïveté de croire que le costume de fonction n'avait aucune importance en ces temps-là ! Rappelons aussi que le port d'un habit bleu de roi sans autorisation spéciale conduisait immédiatement en prison. Ces vêtements particuliers, ainsi que la trompette et les clés des archives, constituaient un important symbole pour la cité. Il y avait trois Consuls en poste à Mende durant cette période. Le dernier dans le rang avait la responsabilité de la fermeture des portes de la ville et se faisait aider dans sa tâche journalière par un aide-valet de Consul. Dans la hiérarchie supérieure se trouvait le Procureur-Syndic et dans une parallèle, le Garde des Archives. Le Consul recevait sa livrée de fonction lors d'une réception en présence de l'évêque, des conseillers et des notables de la ville (portés à deux groupes de 12 personnes en 1766). En haut , à gauche, le blason français (XVIIIe siècle) de la Cité de Mende, capitale du Gévaudan .  A noter , que les livrées des Consuls coûtaient de plus en plus cher suivant l'ordre de rang : 40 livres pour celle du premier Consul ; 30 livres pour la livrée du second ; 25 livres pour celle du troisième. Cette particularité devait être en rapport avec la largeur de fil d'or employé pour la rayure et la garniture de la livrée .

- Valet Consulaire à Mende vers 1764 . Le Valet Consulaire à Mende au temps de l'affaire de la Bête. Il était directement affecté au service des trois Consuls de la Cité ; à ne pas confondre avec les valets de Ville qui étaient tout simplement les membres de la police municipale (voir l'image suivante). Leur fonction consistait à suppléer les Consuls dans leurs différentes tâches. On trouvait un valet attitré à la charge de la trompette pour les publications, un autre pour le soin des basins des fontaines de la ville et encore un pour le contrôle et l'entretien de l'horloge municipale. Ils devaient également veiller à la propreté des rues, ne pas autoriser la déambulation des animaux domestiques et de marché en dehors des heures autorisées, et enfin, d'empêcher qu'on lave le linge aux fontaines. L'habit était confectionné en drap du Languedoc, de couleur olive (dit aussi vert brun). On attribuait également un manteau au valet, qui était renouvelé tous les six ans tandis que l'habit était remplacé tous les deux ans. Le médaillon aux armes de la cité de Mende - visible en haut - était porté sur la manche gauche de la casaque jaune et rouge du Valet Consulaire (couleurs alternées comme celles des gardes suisses du Comtat - voir dossier ''autres évêques''). Si elle n'était plus portée pour le service au XVIIIe siècle, nous supposons qu'elle retrouvait quelque utilité lors de cérémonies (réception des Consuls entre autre) et de diverses grandes occasions (arrivée à Mende de hauts dignitaires).

 

- Valet de Ville à Mende vers 1764 . Valet de Ville (Sergent de Ville) à Mende. Il s'agissait en fait des policiers municipaux de l'époque. Leur fonction alternait entre les diverses surveillances des rues de la cité, le contrôle des portes, des marchands et des animaux déambulant dans les venelles, de la sécurité des habitants et des évènements qui se déroulaient dans l'enceinte de leur juridiction. Ils étaient généralement armés d'une canne, parfois d'une épée et de pistolets. Dans les périodes de trouble, ils pouvaient recevoir des fusils comme ceux de la milice bourgeoise, qui était aussi là dans certaines circonstances pour leur prêter main forte. Durant les périodes où le loup était hissé au rang d'ennemi public, comme pendant l'affaire de la Bête, ils avaient ordre d'abattre tout chien errant se trouvant dans la ville à cause des risques de contagion par la rage. Le 18 avril 1769, suivant le souhait du nouvel évêque, les valets de ville quitteront leurs habits jaunes pour recevoir la livrée rouge du prélat .

 

- Garde personnelle - ou de l'Hôpital - de Monseigneur de Choiseul, évêque de Mende . Suisse, portier ou garde de l'Hôpital de Mende, fondé par Monseigneur Gabriel-Florent de Choiseul-Beaupré. La plupart des grands hôpitaux du royaume disposaient de gardes pour y maintenir, autant que possible, un semblant d'ordre. Celui de Mende n'échappait pas à la règle. Ces employés disposaient généralement d'une hallebarde et parfois d'une bandoulière aux armes (ici celle de l'évêque de Mende). L'homme porte un habit à la livrée de Choiseul (rouge, verte et argent ). Les émaux du blason de cette importante famille étaient azur et or mais comme c'était également ceux de la livrée du roi, elle n'était pas autorisée à les porter pour le service de sa Maison Civile et Militaire. Les Choiseul récupéreront leurs véritables couleurs sous le Premier Empire. Le blason ici figuré est celui du chapitre de Mende. Il est à peu près certain que Monseigneur de Choiseul disposait de quelques gardes de ce type pour assurer sa sécurité dans son palais de l'évêché . Si ce n'est pas un ou deux membre de sa garde personnelle en habits civils , Mgr de Choiseul dépêcha forcément quelques informateurs sur les lieux de prédation du monstre... issu , selon lui , de la colère divine ... 

Quelques victimes de la Bête furent certainement soignées à l'hôpital de Mende ainsi que des hommes du capitaine Duhamel qui s'étaient blessés en traquant le monstre .

En 1767, le successeur de l'évêque de Mende, Monseigneur de Castellane, entretenait 18 serviteurs : 3 officiers, 2 cuisiniers, 4 valets de pied, 2 cochers, 3 postillons, 2 femmes de charge, une femme de cuisine, et un jardinier. Monseigneur de Choiseul-Beaupré disposait de 2 officiers, 1 maître d'hôtel, 2 valets de chambre, 2 cuisiniers, 4 valets, 1 suisse, 2 postillons, 4 valets d'écurie, 2 femmes de charge, une cuisinière, un jardinier et un garde-chasse .

 

- Ouvrier de la Ville de Mende . L'ouvrier de ville était un peu ''l'homme à tout faire'' de la cité. Il se signalait par le port d'un habit gris réglementaire. Les valets consulaires (valets des consuls de la cité) et les valets de villes (sergents de ville) le secondaient dans sa tâche quotidienne. Il devait porter l'épée et la pertuisane (ici représentée) lorsqu'il escortait en précédence les trois consuls de Mende .

 

- Officier de la Milice Bourgeoise de Mende en 1764 . Il s'agit plus vraisemblablement d'un sous-officier portant la hallebarde en substitution symbolique de l'ancien esponton des gradés de l'infanterie avant 1757. Nous avons connaissance de quittances provenant des archives de Mende portant sur l'obtention de deux hallebardes pour la milice bourgeoise de la cité. Bien que les règlements des milices bourgeoises relevaient également des décisions du roi, comme nous l'indiquent une archive du temps conservée à Mende, ces corps bourgeois prenaient toujours quelques libertés ou retards d'applications par rapport aux directives et autres règlements des autorités royales. Ce sous-officier se distingue par un fin galon de bordé sur l'habit qui était déjà pourtant supprimé des ordonnances du temps, mais là, comme pour la milice provinciale et l'armée régulière, les guenilles de Choiseul (épaulettes distinctives du grade imposées par le Ministre des Armées) étaient très mal accueillies et l'ancien règlement subsistait parfois. Le Languedoc produisait en ce temps de forte quantité de drap gris-blanc et c'est en toute logique et pour des raisons économiques que l'on employait prioritairement cette toile pour habiller les miliciens du Gévaudan et ceux des gardes bourgeoises des cités locales.
Le Gévaudan disposait durant cette période d'un corps de miliciens composé de plus de trois cent hommes ( leur nombre fut sérieusement réduit sous le règne suivant) qui servaient le plus souvent en dehors du diocèse voire même de la province . L'uniforme était assez semblable à celui de l'illustration mais les pans de l'habit étaient presque toujours portés en retroussis à la façon de tous les corps d'infanterie de l'époque. Il était aussi très probablement pourvu de revers. Le drap de l'habit des officiers était généralement de meilleure texture que celui utilisé pour la troupe. A l'instar de l'armée régulière, le rang supérieur pouvait arborer le gorgerin de métal en tant que signe distinctif, et bien entendu l'épaulette appropriée au grade. Les officiers supérieurs montés portaient des bottes et ceux qui servaient à pied chaussaient des guêtres militaires de coutil blanc. La garde bourgeoise des villes servait principalement lors des grands événements au sein des cités : revues, fêtes, cérémonies, accueil de hauts dignitaires, etc... Le reste du temps, les hommes et leurs chefs vaquaient à leurs diverses professions de bourgeois locaux et provinciaux . Une recherche plus approfondie à travers les archives de la Lozère pourrait nous permettre de découvrir si une texture autre que le gris ou le gris-blanc fut utilisée pour vêtir la Milice Bourgeoise de la capitale du Gévaudan. Comme par exemple, le drap vert olive, également produit en imposante quantité par la province du Languedoc .
On relève également, dans les archives de la Lozère, la dotation de quatre hallebardes à la cité, qui étaient portées par les sergents de la Milice Bourgeoise .

 

- Milice Bourgeoise de la Ville de Mende vers 1764 .  Les hommes de la formation provenaient surtout des petits corps de métiers des faubourgs de la cité . Nous savons par l'étude des archives qu'ils disposaient de fusils et du classique équipement du fantassin de la période : sabre-épée et baïonnette pour l'arme d'épaule . Nous avons fait figurer ici le fusil modèle lourd de 1763, pesant 4,280 kg, dit Stainville, du nom de son instaurateur, le Comte de Stainville , Duc de Choiseul, cousin de l'évêque de Mende et Ministre des Armées du Roy. Mais on pouvait certainement trouver des modèles antérieurs encore en service. Le fantassin n'est pas équipé de la giberne à banderole en cuir de Russie qui contenait les 19 cartouches . Cette dernière ne présentait pas d'utilité lors des défilés et cérémonies et ne devait sortir des dépôts de corps de garde qu'en cas d'urgence extrême, comme par exemple celle de la défense de la cité : ceci ne se produisit jamais durant cette période ! Mais elle fut cependant distribuée aux soldats qui participèrent très probablement aux battues générales dirigées contre la Bête les 7 et 11 février 1765, organisées par 73 paroisses du Gévaudan et 30 de l'Auvergne et du Rouergue. La combinaison des trois éléments (balle, poudre de charge et poudre d'amorce) dans la cartouche militaire en papier vers 1744 avait énormément simplifié l'utilisation de l'arme et porté la cadence de tir à trois coups à la minute. La lumière de l'arme devait être fréquemment débouchée au moyen de l'épinglette et le silex du chien remplacé après une vingtaine de coups. La portée du fusil était d'environ 80 toises c'est à dire à peu près 160 mètres. Cette réalité d'exercice s'appliquait bien entendu aux fantassins de l'époque, formés au drill et au maniement intensif de l'arme comme pratiquement personne n'est aujourd'hui en mesure de le faire. Précisons tout de même que le fusil était mis hors service par temps de pluie et sous les cieux d'un climat froid chargé d'humidité , souvent au rendez-vous en Gévaudan lors des battues menées contre de la Bête . Ces hommes et leurs officiers étaient au nombre de 100 , le 13 septembre 1764 , lors de la venue du Cardinal Antoine de Clériade de Choiseul-Beaupré à Mende .

 

- Régiment de la Milice Provinciale et Royale du Gévaudan en 1765 ; tenue de marche (route) avec le nouveau modèle de havresac pourvu de courroies latérales au lieu de l'ancienne transversale qui comprimait bien trop la poitrine du soldat lors des marches et l'empêchait de respirer convenablement. On voit aussi l'épaisse couverture roulée pour le coucher sous la tente ou sur les paillasses des casernes comme celle de Mende. En grande tenue, ces accessoires n'étaient pas portés et les cheveux étaient passés au blanc. Le fusil est du modèle Choiseul de 1763 (Stainville) avec sa baïonnette dont le fourreau prenait place sur une patte aménagée en travers de la courroie au dessus de la giberne en cuir de Russie, portée à droite. L'épée est du modèle standard du fusilier de l'infanterie. Le grenadier était pourvu du sabre à lame courbe. Ce corps servait principalement en temps de guerre et à l'extérieur de la province. Il était constitué par la levée (prélèvement d'hommes dans les cités de la province ) de Saugues ... à Mende. Les régiments provinciaux placés en première ligne payèrent parfois un très lourd tribu lors des guerres comme celle de Sept Ans, et il n'était pas rare de voir, face à ce désastre de perte humaines, certains hommes parvenir à se faire porter pâle ou à gagner la clandestinité et le maquis. Mende fournit tout au long des XVIIe et XVIIIe siècles un fort contingent de miliciens allant parfois jusqu'à former de véritables unités comme celle du régiment de Corsac . Durant la Guerre de Sept Ans, le Languedoc fournira 825 miliciens pour constituer les trois régiments de Minorque. Chaque homme recruté coûtait 90 livres, soit un total de 65.250 livres pour couvrir l'ensemble des frais. Les troupes embarquaient à Sète et à Adge pour Port-Vendres, et de là , gagnaient ensuite l'île de Minorque .

Etienne Lafont procureur fiscal de Mende
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